
LA FABRICATION D'ALLUMETTES
La fabrication d'allume-feux en bois est l’artisanat qui fit la renommée du village par-delà les limites du département. Ces allumettes soufrées étaient connues dans la région sous le nom de « togeardes », car elles étaient fabriquées par les habitantes de Toges qui portent le même nom. Idéalement, elles étaient confectionnées avec du tremble, une variété de peuplier forestier. Cependant, du bois blanc comme le tilleul faisait aussi l’affaire. On surnommait le bois dans lequel étaient taillées ces allumettes « bois de lune » car il était repéré la journée par les femmes dans les forêts de l’Etat, puis récolté en fraude la nuit par les hommes. Les Togeardes débitaient les bûches pour en faire de fines planchettes, puis elles enfilaient un tablier noué dans le dos avec une ceinture et plaçaient une plaque en bois sur leur estomac. Assises en tailleur et en rond, elles coupaient les planchettes en lamelles de 12 centimètres à l’aide d’un couteau. Elles liaient les allumettes en fagots d’une douzaine environ, qu’elles soufraient ensuite aux deux extrémités.
Pour lier les bottes, les Togeardes avaient l’habitude d’utiliser de l’écorce d’osier plumé. Les vanniers étaient nombreux au village et lorsqu’ils « triffaient » leur osier, c’est-à-dire lorsqu’ils enlevaient l’écorce des brins, ils conservaient cette écorce qui servait de lien aux fagots d’allumettes. Rien ne se perd, tout se transforme ! Et cela permettait d’économiser trois sous de chanvre ! La solidarité et l’entraide entre les artisans et habitants du village étaient de mise pour lutter contre la misère et la vie difficile que menaient les Togeards.
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1½ cups
Butter
Tremble, bois de lune
3 cups
Flour
3 cups
Blueberries
Lien en écorce d'osier
Extrémités soufrées avec du soufre liquide chauffé
Les bottes d’allumettes étaient placées dans des hottes en osier qui pouvaient peser jusqu’à 60 kilos et que les Togeardes chargeaient sur leur dos. Elles parcouraient chaque jour de nombreux kilomètres de village en village dans l’espoir de les vendre. Elles ne rentraient qu’une fois leur hotte vide et lorsqu’elles étaient trop loin pour rentrer au village, elles dormaient chez l’habitant ou chez un aubergiste. L’hiver froid des Ardennes leur fournissaient un prétexte pour se réchauffer chez le cabaretier qui leur offrait un morceau de pain qu’elles trempaient dans une tasse de liqueur de fruits tout droit sorti de l’alambic, et la légende veut qu’elles répétaient chaque fois que leur tasse se fût vidée: « R'donnez m'en pou' deux sous, c'est mon pain qu'a tout bu ! » C'est en 1956 que la dernière marchande de togeardes posa sa hotte pour de bon.