
LA FABRICATION D'ECHELLES EN BOIS
Le savoir-faire artisanal de la fabrication d'échelles en bois est ancestral à Toges. Il a été transmis à Pierre Deroche par son père, Aimé, qui lui-même le tenait de son grand-père, Sylvain. Cet artisanat était d’abord utilitaire et fonctionnel car les échelles étaient utilisées par des fermiers, maraîchers, vignerons et agriculteurs de la région. La fabrication d’échelles se faisait en trois temps : d’abord les busons –ou barreaux–, puis les montants –ou rampes–, et enfin l’assemblage. « On avait l’habitude de fabriquer des busons à la chaîne pendant trois ou quatre jours, puis on passait aux montants, et ce n’est qu’ensuite qu’on les assemblait » nous raconte Pierre dont les souvenirs semblent gravés à jamais dans sa mémoire.
Les bûches de bois utilisées pour confectionner les busons étaient d’abord débitées, puis elles étaient façonnées en profil de pentagone grâce à une plane et à un cheval à planer. Cette forme particulière donnée aux busons les empêchait de tourner dans le montant une fois qu’ils y étaient insérés. De plus, elle accroissait leur solidité car le renfort était placé au milieu du buson, exactement là où le pied venait se placer. La longueur des busons de l’échelle était variable : elle atteignait 70 centimètres en bas pour se réduire à 35 centimètres au plus haut, ce qui rendait l’échelle plus stable et plus robuste. La longueur du montant quant à lui, pouvait également varier en fonction de la commande reçue. Pierre nous confie avec un sourire que lorsqu’il était enfant et qu’il était trop fatigué pour suivre la cadence de son père, il allait « redonner du coupant » à sa plane, nous comprendrons ici qu’il l’aiguisait. La phase finale était l’assemblage des éléments : les busons étaient humidifiés avec de l’eau, de même que les trous percés dans les montants afin de faciliter leur imbrication. Chaque buson était séparé par 25 centimètres et une pointe était plantée tous les quatre barreaux, c’est-à-dire tous les mètres. « On n’avait pas besoin de calibreuse en ce temps-là, les gestes étaient toujours les mêmes et l’œil suffisait » précise Pierre avec fierté et une pointe de nostalgie.
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1½ cups
Butter
Plane
3 cups
Flour
3 cups
Blueberries
Buson ou Barreau
Cheval à planer
Cale à bois
D’autres outils en bois étaient fabriqués à Toges puisque la forêt environnante regorgeait de cette matière première. Ainsi, toutes sortes de manches en bois, manches à balai, râteaux, y étaient confectionnés. Les râteaux à faner des Deroche avaient la particularité d’être pourvus d’une série de pics en bois de chaque côté et d’être renforcés par un lien en osier. Trois trous étaient percés : deux sur chaque côté du râteau et le troisième traversait le manche. Le brin d’osier était fixé à l’un des trous du râteau, puis enfilé dans le trou du manche, pour ensuite être accroché et serré au dernier trou du râteau.
Finalement, pour vendre leurs échelles et outils, Pierre et son père chargeaient leur cargaison sur une charrette et se transformaient en véritables marchands ambulants, proposant leurs marchandises de villages en villages. Pour ne gâcher aucun matériau, les copeaux et les chutes de bois étaient souvent récupérés et emballés dans des sacs de chanvre. Ils étaient ensuite utilisés pour allumer le feu et le surplus était revendu. Cette vie de dur labeur et de précarité a incité les Togeards à imaginer des astuces et à développer leur inventivité pour survivre.